Pouvoir et pouvoirs - Période contemporaine - Relations de pouvoir entre les mouvements nationalistes et l’État



Qu’elle soit Canadienne française ou Québécoise, l’appartenance à la nation est un enjeu qui a entraîné bien des luttes de pouvoir entre les mouvements nationalistes et l’État pendant la période contemporaine. Au début du 20e siècle, Henri Bourassa est une figure importante des mouvements nationalistes. D’abord élu comme député sous Wilfrid Laurier, il démissionne du Parti libéral en 1899 parce qu’il juge que ce dernier devrait être plus nationaliste et cesser de se plier à la volonté de la Grande-Bretagne. Il est aussi plus tard élu comme député provincial, mais il fait surtout pression sur l’État en étant le fondateur du journal Le Devoir, dans lequel il écrit, ainsi qu’avec ses discours contre la conscription et pour la défense du français.

En 1917, le gouvernement fédéral impose la conscription, malgré l’opposition des mouvements nationalistes. En fait, ce sont surtout les francophones qui s’opposent à la conscription, les anglophones sont majoritairement en faveur de celle-ci. Quand commence la Deuxième guerre mondiale, les milieux nationalistes sont méfiants et Mackenzie King, pour les rassurer, promet que la participation du Canada à la guerre sera limitée et qu’il n’y aura pas de conscription outre-mer. Cependant, le contexte de guerre n’est pas très favorable pour les Alliés en 1941 et on manque de volontaires. Le gouvernement King trouve une solution astucieuse pour sortir de cette impasse. Il décide de faire appel au peuple par un plébiscite pour lui permettre de revenir sur sa promesse. Au Québec, c’est la Ligue pour la défense du Canada, un mouvement nationaliste dans lequel milite Henri Bourassa, mais aussi Maxime Raymond et André Laurendeau, qui va faire campagne auprès de la population pour l’inciter à voter NON et forcer King à tenir sa promesse de ne pas faire de conscription. Malgré leurs tentatives, ce n’est pas suffisant. Bien qu’au Québec la ligue pour la défense du Canada gagne son pari, Mackenzie King est peut imposer la conscription puisque dans l’ensemble du Canada, on lui donne raison. Plusieurs membres de la ligue pour la défense du Canada vont malgré cela continuer de militer contre la conscription et fonder un parti politique, le Bloc populaire.
Dans les années 60, les mouvements nationalistes vont se multiplier. Plusieurs de ceux-ci revendiquent une modification du statut politique du Québec, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur du Canada. De nouveaux partis politiques qui prônent l’indépendance du Québec émergent, comme le Rassemblement pour l’indépendance nationale ainsi le Ralliement national. En 1967, c’est au tour du populaire député libéral René Lévesque de joindre les rangs des souverainistes. Il quitte son parti pour fonder le Mouvement souveraineté association, un mouvement qui deviendra en 1968 le Parti Québécois, qui va regrouper la plupart des membres des autres partis indépendantistes.


D’autres nationalistes s’interrogent sur l’avenir constitutionnel du peuple Canadien français. Pour trouver la réponse, on consulte les principaux intéressés. C’est pour cette raison que Les États généraux du Canada français seront organisés à la fin des années 60. En 1967, des mouvements nationalistes de tout le Canada français envoient des délégués pour discuter de leur avenir. L’effet de ces États généraux est identitaire. Les Canadiens français prennent alors conscience que le Canada français constitue une nation qui est libre de choisir elle-même son statut politique, mais ils jugent aussi que c’est surtout sur le territoire du Québec que cette lutte politique doit se faire.

Dans d’autres occasions, les mouvements nationalistes utilisent des moyens plus musclés pour faire valoir leurs revendications. Par exemple, le 24 juin 1968, une manifestation est organisée à Montréal par des militants indépendantistes. Ceux-ci, adversaires de Pierre-Eliott Trudeau, sont choqués de savoir qu’il est présent sur l’estrade d’honneur en compagnie d’autres dignitaires le jour de la St-Jean-Baptiste. Une émeute éclate et la répression policière fut importante : environ 300 arrestations et plus d’une centaine de blessés. Les manifestants accusent alors la police d’avoir utilisé une force excessive et surnomment cet événement le « lundi de la matraque. »

Cependant, le groupe nationaliste qui est le plus radical dans ses moyens d’action, c’est définitivement le Front de libération du Québec. Ce groupe indépendantiste s’inspire de mouvements révolutionnaires d’ailleurs dans le monde et commet divers actes de terrorismes durant les années 60, comme le braquage de banques ou la pose de bombes devant des symboles fédéraux ou anglophones. En octobre 1970, une cellule du FLQ procède à l’enlèvement de James Richard Cross, un diplomate britannique. Ils exigent plusieurs choses du gouvernement, dont la lecture de leur manifeste à la télévision ainsi que la libération de plusieurs de leurs membres qui sont en prison. Quand une deuxième cellule du FLQ va enlever Pierre Laporte, le vice-premier ministre, la réaction des gouvernements sera plus vive. Dépassé par les événements, Robert Bourassa, demande l’aide des Forces armées canadiennes. Le gouvernement applique aussi la Loi sur les Mesures de guerre, une vielle loi qui date de la Première guerre mondiale qui suspend les libertés civiles en cas de guerre ou d’insurrection. Cette loi mène à l’arrestation de plus de 400 personnes sans mandat par les policiers. Pierre Laporte, quant à lui, est retrouvé mort peu de temps après, mais James Richard Cross a plus de chance et est libéré en décembre 1970, après des négociations avec ses ravisseurs. Ces derniers peuvent s’enfuir à Cuba, une chance que n’ont pas ceux de Pierre Laporte qui sont arrêtés et condamnés à la prison.


Bien que le FLQ ait pris des moyens radicaux pour faire valoir ses revendications, la majorité des indépendantistes utilisent dans les années 70 des moyens démocratiques. En 1976, le Parti Québécois de René Lévesque prend le pouvoir. Il est élu en faisant la promesse de bien gouverner le Québec. Une fois au pouvoir, le Parti Québécois adopte, entre autres, la Charte de la langue française. Cependant, le Parti Québécois, pour respecter sa promesse, doit aussi organiser un référendum sur la souveraineté durant son mandat, qu’il organise en 1980. Celui-ci porte sur le concept de souveraineté – association. Ainsi, René Lévesque veut obtenir le mandat de négocier la souveraineté du Québec avec le reste du Canada, tout en maintenant avec celui-ci une association économique. Le choix de la population est sans équivoque, 60% de celle-ci refuse à René Lévesque et au Parti Québécois le mandat de négocier la souveraineté – association. Quinze ans plus tard, de retour au pouvoir après plusieurs tentatives infructueuses des gouvernements de trouver une solution aux problèmes constitutionnels du Québec et du Canada, le Parti Québécois organise un deuxième référendum sur la souveraineté. En plus du PQ, il implique deux autres partis politiques : l’Action démocratique du Québec, de Mario Dumont, ainsi que le Bloc Québécois, un parti souverainiste fédéral dirigé par Lucien Bouchard. Quoique nettement plus serré, le résultat est le même qu’en 1980. Ce deuxième échec référendaire amène le gouvernement fédéral à voter la loi sur la Clarté référendaire en 2000. En se basant sur un avis de la Cour Suprême, la loi adoptée par le gouvernement libéral de Jean Chrétien précise que toute question référendaire portant sur la sécession du Québec doit d’abord être approuvée par la Chambre des Communes pour être jugée valide. Un avis que ne partage pas le gouvernement du Québec qui adopte en 2001 une loi qui stipule que seul le Québec peut choisir son statut politique.
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